Authors:François Pépin Abstract: Le titre de cet ouvrage a de quoi dérouter. À quoi bon parler d’une « philosophie de la biologie avant la biologie » ' Ne serait-il pas plus exact de parler de philosophie de la médecine, des sciences du vivant ' Le sous-titre renforce le paradoxe puisqu’il laisse entendre que cette philosophie de la biologie d’avant la biologie se laisserait approcher par, voire reviendrait à une histoire du vitalisme. Or, outre qu’il n’est pas du tout assuré que les deux choses convergent, le « vitalisme » pose lui aussi un problème de chronologie puisqu’il apparaît à peu près à la même époque que le terme de biologie (à la fin du XVIIIe siècle). Il faudrait donc comprendre que le présent ouvrage nous propose d’aborder la philosophie de la biologie d’avant la biologie à partir d’une histoire du vitalisme commençant avant le vitalisme. Entreprise paradoxale sans doute, surtout si l’on prend les termes dans un sens restrictif. Mais à la lecture de l’ouvrage, on peut dire que le pari est tenu. Le « vi... PubDate: 2020-08-27
Authors:Pietro Costa Abstract: Un livre sur Montesquieu et sa « philosophie du droit pénal » ' Ou plutôt une réflexion sur le fondement et la signification actuelle d’un système de garanties qui protège l’individu des abus du pouvoir (et des pouvoirs) ' Mon sentiment est que le livre de Dario Ippolito échappe avec bonheur à cette alternative. Il parvient à fondre harmonieusement un souci de reconstitution historique (la compréhension de Montesquieu dans son contexte spécifique) et une interrogation sur les raisons actuelles de l’État de droit. D. Ippolito lit Montesquieu en se posant continuellement, quoique silencieusement, la fameuse question d’Hamlet : « Que lui est Hécube et qu’est-il à Hécube pour qu’il pleure ainsi sur elle ' » L’histoire que raconte D. Ippolito veut non seulement nous restituer un monde éloigné et perdu, mais également nous aider à comprendre les racines de notre présent. Un tel choix est méthodologiquement irréprochable, du moins si l’on estime que l’opération historiographique, comme tout... PubDate: 2020-07-14
Authors:Géraldine Lepan Abstract: L’époque contemporaine est dominée par l’injonction à « produire du lien social », laissant supposer que le lien social est en crise, qu’il s’est perdu, à tout le moins s’est affaibli, morcelé et diversifié, sous le coup de l’individualisme, de l’accroissement des inégalités, de la perte des sentiments collectifs et d’une forme de consensus moral. L’urgence sanitaire dans laquelle nous sommes plongés nous exhorte soudainement au confinement généralisé en faisant résonner le concept nouveau de « distanciation sociale ». Cet impératif coïncide, par un concours de circonstances assez étrange, avec la parution d’un dossier sur le « lien social ». Peut-être cette situation inédite fait-elle encore mieux ressentir à quel point l’homme, en tant qu’être fondamentalement social, se construit en rapport avec autrui. L’injonction à couper tout lien social altère la dynamique même qui structurait notre quotidien et organisait notre projection dans le temps, et qui reposait sur le fait qu’on ava... PubDate: 2020-07-08
Authors:Létitia Mouze Abstract: Il s’agit d’explorer la notion politique de « lien » (desmos) chez Platon et de déterminer son rapport avec la philia (amitié) des citoyens entre eux, condition sine qua non de la cité, et que l’on peut identifier à ce que nous appelons « le lien social ». Deux textes sont examinés dans cette perspective : Les Lois, VII, 793a-d et Le Politique, 305e et suiv. Bien que le terme soit pris dans chacun d’entre eux selon un point de vue différent (objectif dans les Lois, où il désigne les coutumes qui lissent et solidifient l’édifice législatif ; subjectif dans le Politique, où il désigne l’opinion vraie présente dans les âmes, grâce à laquelle celles-ci harmonisent leurs conceptions et donc leurs actions), il s’avère que le desmos est à chaque fois constitué par les manières de faire communes, lesquelles reposent sur des opinions communes. Fruit de l’éducation, œuvre politique essentielle et première, il est ce sans quoi la philia (le lien social, donc) n’est pas possible, ni par conséqu... PubDate: 2020-07-08
Authors:Jean-Baptiste Vuillerod Abstract: Cet article cherche à rapprocher les pensées de Louis Althusser et de Theodor W. Adorno autour de trois grandes questions : le primat de la théorie, la théorie de la société et de l’histoire, et la critique du sujet. Dans chaque cas, il s’agit de mettre en évidence les points communs entre les deux penseurs tout en soulignant leur désaccord fondamental en ce qui concerne la manière dont chacun se rapporte à la philosophie de Hegel. Là où Althusser vise à repenser le marxisme sur des bases non hégéliennes, Adorno veut au contraire revenir à Hegel pour ressourcer le marxisme en temps de crise. PubDate: 2020-07-08
Authors:Géraldine Lepan Abstract: L’article explore les différentes modalités du lien chez Rousseau, social, civil, politique, selon les principaux axes de sa pensée. On part de la critique de la sociabilité des Lumières conduite dans le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes pour confronter le remède politique apporté dans le Contrat social à l’analyse qui est menée dans l’Émile autour de « l’homme abstrait » cultivant sa capacité d’attachement. Peut ainsi émerger la généalogie des liens à partir des relations de besoin. En contrepoint de la condamnation de la dépendance réciproque, une cartographie des notions de liaison, rapport, relation, nœud et ressort permet de donner tout son sens à la définition positive de l’homme comme « être relatif ». PubDate: 2020-07-08
Authors:Christophe Martin Abstract: Si l’idée d’isoler des êtres neufs, méticuleusement soustraits aux processus usuels d’éducation et de socialisation, n’est pas une invention du siècle des Lumières, de telles expériences fictives (qu’il s’agisse d’expériences de pensée, de projets d’expérimentation, ou de fictions littéraires d’isolement enfantin) se multiplient au XVIIIe siècle. La dissolution expérimentale du lien social vise le plus souvent à démontrer la naturalité de ce lien et sa nécessité dans le développement des lumières de la raison. On se propose ici de mettre en lumière la rupture considérable qu’introduit la problématique rousseauiste dans l’élaboration de ces fictions d’isolement enfantin : dans le sillage du Second Discours et de l’Émile, il ne s’agit plus de montrer l’abêtissement que produirait la rupture du lien social, mais bien au contraire de désinhiber les propriétés originaires de la nature des hommes que le processus double de dénaturation et renaturation leur a fait perdre, et de développer ... PubDate: 2020-07-08
Authors:Éléonore Le Jallé Abstract: En partant d’une métaphore que l’on trouve dans le troisième appendice de l’Enquête sur les principes de la morale de David Hume, je compare les modalités du lien social correspondant respectivement aux « vertus naturelles » (bienveillance) et aux « vertus artificielles » (justice) qu’il détermine, en présentant les grandes notions humiennes s’y rapportant (sympathie, convention) et en confrontant Hume à deux philosophes contemporains qui, sur ces questions, font référence à sa pensée (David Lewis sur la convention, John Rawls sur l’amour de l’humanité et la justice). J’étudie pour finir les contradictions possibles de la bienveillance et de la justice, dans la mesure où selon Hume certains actes isolés de justice, aussi indispensables soient-ils à la cohésion de la « voûte » de la justice, n’en posent pas moins certains problèmes du point de vue de la vertu de bienveillance qu’ils excluent, comme du point de vue de l’approbation morale dont ils font l’objet. À ce titre, ils constit... PubDate: 2020-07-08
Authors:Éric Marquer Abstract: En développant l’argument selon lequel les mots sont les signes des idées de celui qui parle, Locke semble assigner une origine individuelle à la signification. Pourtant, au début du livre III de l’Essai sur l’entendement humain, il définit le langage comme le lien commun de la société : loin de constituer une simple formule d’introduction, cette définition est illustrée et confirmée tout au long du livre. Le langage constitue un lien commun parce qu’il fixe non seulement les idées mais également les rapports entre idées d’une manière qui détermine l’esprit des hommes et organise leurs représentations. Plutôt que de voir en Locke un penseur de l’intériorité, pour lequel le langage n’est que l’extériorisation par le signe de pensées qui sans les mots resteraient enfermées dans l’esprit de l’homme, il faut envisager le rôle des pratiques et des usages dans la constitution du rapport entre idées. Tout en élaborant une critique de l’imperfection des mots, Locke, à la suite d’Arnauld et ... PubDate: 2020-07-08
Authors:Sylvia Giocanti Abstract: Si l’on conçoit le lien à la fois comme préexistant et nécessairement emprunté, il n’y a aucune nécessité à le valoriser socialement et politiquement selon le modèle de la fusion communautaire, où les individus ne feraient qu’un. Nous voudrions montrer à partir de cette considération, d’une part que Montaigne promeut une communauté de la différence, dans un bon usage de la conflictualité inhérente à l’ambivalence des désirs, d’autre part qu’il ne valorise pas pour autant l’organisation de la servitude dans le règne de la concupiscence par la réduction des liens sociopolitiques à la sphère trompeuse des apparences, où la civilité, au fond, ne serait que haine. À la différence de Pascal, le lien est en effet pour Montaigne ce par quoi nous accédons à l’identité et l’estime de soi, dans les structures mêmes de l’aliénation : « notre condition singeresse et imitatrice » est la condition de notre humanisation dans et par la vie sociale qui repose sur le regard de l’autre et le partage de... PubDate: 2020-07-08